Mondiale: Les intellectuels arabes entre Etats et intégrisme
Là où, dans la plupart des pays arabes, on imagine un affrontement, c’est plutôt un jeu permanent d’alliances, un pacte tacite entre trois puissances inégales : autorisés à élargir leur emprise dans la société, les fondamentalistes cessent de privilégier la conquête du pouvoir politique ; protégés par l’Etat de la férule des intégristes, les intellectuels laïques taisent les travers autoritaires du pouvoir et réservent leur militantisme à des causes consensuelles ; ménagé par les intellectuels et toléré par les religieux, l’Etat autoritaire perdure.
Au cours des deux derniers siècles, les oulémas se sont toujours méfiés des formes modernes d’expression culturelle, redoutant qu’elles ne permettent aux gens d’appréhender leur vie et le monde selon des modalités extérieures à la religion. Mais ils avaient beau protester, la plupart des pratiques artistiques et culturelles n’en restaient pas moins acceptées. Certaines productions (la peinture moderne, par exemple) portaient, il est vrai, la marque de l’Occident et n’intéressaient guère que les effendis (bourgeois occidentalisés).
Cette tolérance prudente relevait d’un cadre de pensée théologique (kalam) dans lequel la religion ne se limite pas à la loi religieuse (charia), mais accueille également un certain pluralisme. Des pratiques littéraires et artistiques plus ou moins profanes (poésie, calligraphie, arts plastiques, musique) étaient jugées compatibles avec la religion, même quand elles bousculaient les convenances. Des œuvres d’une formidable diversité et d’une créativité souvent audacieuse font partie intégrante de notre histoire.
La grandeur de l’islam résidait précisément dans son aptitude à absorber une myriade d’influences culturelles. Le monde musulman protégeait, étudiait et développait les grandes traditions de la littérature et de la philosophie classiques. Au lieu de brûler les livres, on y construisait des bibliothèques pour les préserver. Ce fut longtemps un sanctuaire pour les documents fondateurs de ce que l’on appellerait plus tard l’Occident. Le monde musulman avait compris que cet héritage constituait le patrimoine intellectuel de toute l’humanité.
Avec l’émergence des mouvements fondamentalistes, une nouvelle norme a vu le jour. On la qualifie souvent de « salafiste », en référence à la vision étroite de l’orthodoxie religieuse sur laquelle elle s’appuie. Le fait qu’il s’agisse d’une idéologie implicite, car rarement prescrite par la loi ou l’administration, n’enlève rien à sa puissance, bien au contraire. Cette norme tire son autorité non d’un pouvoir politique, mais de la place (...)
Retrouvez la version intégrale de cet article dans Le Monde diplomatique d’août 2010 actuellement en kiosques.
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